mardi 17 février 2009

Procès Tiberi 7éme journée : l'opération tête bêche

Compte-rendu : Loly Clerc
Dessins d'audience : Jean-Louis Giron

Au septième jour du procès des faux électeurs, on mesure comment le président Albert a construit les audiences : comme une pièce de théâtre classique : première semaine et début de la seconde semaine, exposition décor et personnages, l’intrigue se noue, fin de la seconde semaine, l’intrigue fait sentir ses effets : la fraude s’expose. Viendront enfin les confrontations et les plaidoiries. En somme, une montée dramatique parfaitement organisée avec des protagonistes ne se départissant pas de leur rôle.

L’OPERATION TETE BECHE
Ainsi, Jaqueline Mockriky ! Elle est la secrétaire modèle qui a perdu la mémoire : elle ne se souvient de rien. Que des gens n’habitent plus le 5 e et continuent à voter, elle ne voit pas de mal à cela, qu’un parallèle puisse être établi entre les demandes de logement et les demandes d’inscriptions sur les listes électorales, elle ne comprend pas… Il semble qu’elle n’ait eu connaissance de toute l’affaire que par la presse et lorsqu’on l’a maintenue en garde à vue. Elle essaie de faire passer le message selon laquelle la garde à vue a été très dure mais le Président balaye l’argument. Le problème de Jacqueline Mockriky c’est que, ne se souvenant de rien, elle s’obstine à citer les éléments du dossier dont elle a eu connaissance et cela finit par agacer le tribunal. Elle ne reconnaît rien. Elle n’allait jamais au bureau des élection sauf une fois, à la veille des élections de 94, pour voir si les cartes de quelques personnes qu’elle connaît et qui ne l’avaient pas reçues, s’y trouvaient… ». Comme c’est curieux dit le Président, et vous y avez rencontré Mesdames Tiberi, et Affret ! ».Elle concède que oui.
En 97, non, elle n’y a jamais remis les pieds. « Vous ne vous souvenez donc pas de ce que vous avez dit aux gendarmes ? Vous avez trié certaines cartes et les avez mises tête-bêche. Vous êtes la seule à l’avoir dit. .. ». « On reparlera de cette Opération Tête bêche » dit le président à qui l’expression plait visiblement. Reste 191 cartes marquées de ses initiales. Alors ça, elle ne voit pas du tout qui a pu mettre ses initiales, pas elle en tout cas. Bref, Jaqueline Mockriky devenue chef de cabinet à coup de promotions internes a beaucoup pratiqué le « peut-être », « il me semblait que » « Naturellement.. » et finalement n’a rien lâché. Une secrétaire modèle au sens où elle sait garder tous les secrets du patron.


JE M'OCCUPAIS AUSSI DES VRAIS ELECTEURS

Avec Madame Affret, on est constamment partagé entre le rire et la compassion ou un certain écoeurement. D’emblée, elle reconnaît tout, la coordination des petites mains c’est elle, l’organisation de la fraude c’est elle mais « on ne faisait pas que des faux électeurs, Monsieur le Président , je m’occupais aussi des vrais électeurs du cinquième ! ». La vraie question évidemment demeure : pourquoi ? Pour qui ? Et là, elle reste soudain très vague :
- Le Président : Je cite Madame Hardouin « Dans cette mairie, on ne pouvait pas avoir toutes les initiatives ! ».
- Madame Affret : « C’est sûr ! Je ne dirigeais pas la mairie !
- Le Président, cite toujours madame Hardouin : « Au dessus de madame Affret, il y avait Madame Tiberi et Monsieur Tiberi ». Alors qu’en pensez vous ? Je ne vous demande pas de balancer madame Affret.
- Madame Affret : « Je n’accuse personne. j’assume la responsabilité de ce que j’ai fait mais je ne dénonce pas ».
Tout son système de défense se tient là. Madame Affret, c’est le dernier rempart des Tiberi avec Jaqueline Mockricky, tous les autres ont lâché, pas elles. Et puis, elle explique que cette fraude, elle ne s’en est pas rendue compte en fait : « les choses se sont fait naturellement, peu à peu, tout le monde s’entendait bien… ». En revanche, elle charge Nantien. L’ancien secrétaire général se voit ramené à sa responsabilité administrative, Madame Affret explique qu’elle ne connaissait pas le code électoral, qu’elle agissait souvent à la demande de Nantien, que tous les dossiers passaient par lui et donc… « Je prends toutes mes responsabilités, dit-elle, mais pas au-delà » !. Ainsi, elle nie avoir conseillé fortement aux demandeurs de place en crèche de s’inscrire et de voter : « Ah non, on peut tout dire et n’importe quoi, mais là, je vous dis la vérité ! » , De même elle n’aurait jamais donné des indications aux gardiens d’immeubles où étaient hébergé les électeurs fictifs : « Trop c’est trop , je n’ai pas fait tout toute seule ! ».
Puis le Président lâche prise. Surprenante Madame Affet. Au Procureur qui lui demande si tous les Vechione qui étaient hébergés au 1 rue saint Médard (il y en a une douzaine !) sont tous logé là, elle répond :
-C’est ma famille ! Je suis ravie de pouvoir en parler…Et la voici qui se lance dans une généalogie complexe où s’entremêlent habitat, origines, déménagements et affection. Et elle conclut : « Nous aimions l’idée d’aller voter tous ensemble dans cet arrondissement que nous aimons, c’était comme une partie de campagne ! C’était purement affectif ».
Tactique formidablement efficace : les interlocuteurs sont noyés sous un flot de paroles partant dans tous les sens. Le Président a tenu une heure, les autres calent assez vite. On ne tire donc pas grand chose de cet interrogatoire : elle se place sous l’autorité de Monsieur Nantien, tout en admettant ses fraudes. Quant à madame Tiberi , Madame Affret dit : « Moi, je ne prends pas d’initiatives, alors je ne vais pas donner des ordres à Madame Tiberi. Elle est la femme de l’élu ». Puis elle ajoute qu’elle « n’est pas l’organisatrice de tout cela. ». Tout de même, les avocats de la partie civile tentent un baroud d’honneur :
- Maitre francis Coguel : « Vous êtes la première élue après le maire, ne trouvez-vous pas qu’il y a un certain cynisme à dire je reconnais avoir fait des faux mais il appartenait au secrétaire général Monsieur Nantien de tout arrêter en les mettant à la poubelle ?
- Madame Affret Non je ne trouve pas ça cynique.
- Maître Francis Goguel : « Mais à qui ça profite ? A Nantien ?
- Madame Affret : Non à l’élu. Ce sont les élus qui se présentent !

RIEN VU RIEN FAIT

Madame Tibéri vient à la barre très décontractée, son manteau renvoyé sur ses épaules comme un décolleté années cinquante. Elle n’a rien vu, rien fait, tout découvert chez le juge. D’emblée, elle précise :
- Vous parlez de système ! Mais si c’était un système il y aurait des milliers de voix en trop alors que là, même pas deux cent voix ! (Dans sa voix un rien de mépris, un je ne sais quoi qui trouve que franchement, s’affoler pour deux électeurs fictifs !). Après, elle continue sur sa ligne de défense : pas là, pas concernée, femme d’élu sans pouvoir. Elle ignorait tout des activités frauduleuses de madame Affret, tout au plus concède-t-elle qu’elle savait que des gens continuaient à voter dans le 5e par affection ou amitié !
- Mais enfin, dit le Président, vous avez entendu le témoignage de Madame Harduin malheureusement décédée aujourd’hui. Elle vous cite partout.
- Madame Harduin perd ses centres (sic). Elle était malade. Mon omniprésence est une vaste blague !
- Mais enfin, elle n’est pas la seule à vous avoir entendu demander qui voulait héberger des électeurs !
- Ce n’est pas moi, ce n’est pas madame Affret.
- Personne ne veut porter le chapeau, pourtant, il y a un chapeau soupire le président.
Ensuite, ça continue, : « les cartes d’électeurs ? Jamais vues, je suis trop brouillon, je les perdrais ! » Le témoignage de madame Matthias ? « Oh, elle me déteste, elle me déteste, elle me déteste ! » Monsieur Nantien ? « c’est un amer, un déçu un déchaîné qui dit n’importe quoi » Sur son banc, le déchaîné fait penser à tout sauf à de la violence même verbale !.Les douze personnes qui la mettent en cause ? « Des menteurs, des aigris. »
-Le Président : Dites moi quel est l’intérêt des fonctionnaires de la mairie de faire des faux ?
-Madame Tiberi (marmonnant) : Qu’est ce que c’est que cette question (comme si elle ne l’avait pas prévue dans son training de défense).
-Le Président : Madame Affret agissait-elle sur les ordres de Monsieur Nantien ?
- Madame Tiberi : C’est l’homme le plus amer de la terre. !
Imbattable, Madame Tibéri, ne reconnaissant rien même l’évidence.
UN SYSTEME Où ?

Jean Tiberi arrive à la barre en fin de journée. Il reprend le même système de défense que sa femme mais plus élaboré : « On a parlé d’un système, la presse a donné des chiffres fantaisistes finalement de 12000 on est passé à 7000 puis 5000 pour traiter ici moins de deux cent votes. Ce sont des opérations qui ne sont pas un système !
Le Président enregistre mais s’obstine :
- On a l’impression d’une routine qui a perduré !
- Je ne peux pas répondre. Il n’y avait pas d’ordres. Je pense qu’il s’agissait de comportements naturels.
- Peut-on faire des faux naturellement ?
- Ah non certes pas ! Il est vrai que de bonne foi, certains ont fait des faux dans l’enthousiasme d’une campagne électorale. C’est regrettable.
La défense de Jean Tibéri est simple : puisqu’il était élu confortablement pourquoi se serait-il lancé dans une opération douteuse ? « Si j’avais su jamais je n’aurais permis de telles manœuvres. D’ailleurs cela ne m’est jamais revenu aux oreilles ! ».
Le Président s’étonne de ce que madame Tibéri ne lui ait jamais parlé de quoi que ce soit. Même défense : « Ma femme avait une liberté totale d’action. Je lui faisais confiance. Son rôle était limité. Et elle n’aimait pas que je la surveille et que je lui pose des questions ».
Mais , le Président insiste « Comment expliquez vous qu’elle soit citée par tant de témoins et de prévenus »
- Elle est très connue. Madame Matthias qui a déposé contre elle était animée par une forte hostilité et montée par la partie civile. Des témoins peuvent mentir effrontément.
Le président évoque la réunion de 1997 où on signale la présence de Jean Tiberi au bureau des élections. Il balaye d’un revers de main : « Mensonge total ! ».
Enfin, le Présidentsort une liste où sont mentionnés de la main de Jean Tiberi des appréciations sur certains électeurs, entre autres certains fictifs. Là, Jean Tiberi marque une légère hésitation, une légère déstabilisation aussitôt reprise :
- Je m’étonne que cette liste ait pu tomber entre les mains de monsieur Nantien.
Mais il n’en dira pas plus. Tout tourne autours de l’activité des fonctionnaires et des militants RPR, tous selon lui, gens de bonne foi, connaissant mal les lois. Avec peut-être certains fonctionnaires qui, comme Nantien « auraient du, dit sévèrement Jean Tiberi, dès qu’ils en ont eu connaissance aller tout dénoncer au Procureur ! ».
Un silence se fait. Le président dit doucement :
- Et vous Monsieur Tibéri ?
Encore un silence, à la barre, l’autre, surpris, ne sait plus où on va. Il hésite et dit :
- Moi Monsieur le Président ?
Le président laisse passer quelques secondes et dit qu’il en a fini.
Là encore les parties civiles tentent quelques questions mais en vain.

A la nuit tombée, les parties civiles traversant la grande cour pavée du palais de Justice tentent un bilan : Madame Affret se dresse devant les Tiberi comme une dernière défense. Mais elle est fragile :elle ne peut admettre qu’elle avait tous les pouvoirs à la Mairie, et ne peut non plus concéder que tout était verrouillé par le couple. Elle se décharge donc sur Nantien. Or celui-ci ne va sans doute pas se laisser accabler. Finalement le bloc Tibéri est acculé à nier. Pour combien de temps ?

jeudi 12 février 2009

Procès Tiberi : quatrième journée : les élus, la mairie, la permanence

La seconde semaine s’ouvre avec un certain suspense : aujourd’hui, les accusés les plus importants dont Xavière et Jean Tiberi seront interrogés. Les avocats qui, pour certains étaient allés vaquer à leurs autres affaires, reviennent ; la presse, malgré la présence d’Yvan Colonna aux Assises remplit ses bancs et dans le public, des supporters du célèbre couple. Une dame a même fait le voyage de Corse ! En bref : l’audience fait salle comble.


Cela ne trouble évidemment pas le Président qui commence par réorganiser la rangée des prévenus assis devant lui. Cela donne, de gauche de la barre : Jaqueline Mockriky, Xavière Tiberi, Jean Tiberi, Bardon, et Anne-Marie Affret, devant leurs conseils, et à droite de la barre, de gauche à droite, Raymond Nantien, Olivier Fabre, Mercier et Farida Sahnoune. Pourquoi remplacer à coté de Xavière, Olivier Fabre par Jacqueline Mockriky la fidèle collaboratrice de Jean Tiberi, celle qui n’a rien vu, rien entendu ? Sont-ce d’un côté les prévenus qui ont déjà fait des aveux, de l’autre ceux qui n’ont rien voulu lâcher ? Les voies du Président sont insondables.
Mais ce faisant, le président constate qu’il manque une prévenue, Madame Havre. Où est-elle ? On téléphone, on s’alarme, rien ! Madame Havre demeure invisible pendant toute l’audience. Mais assez de temps perdu, voici à la barre, Bernard Bardon, ancien collaborateur de Jean Tibéri, maire du 5eme, lorsque Jean Tiberi a succédé à Jacques Chirac à l’Hôtel de ville.

"UN MAIRE DE TRANSITION UNE POTICHE"
Les myopes ont derrière leurs lunettes, un regard d’enfant perdu, cela leur confère un certain charme. C’est le cas de Bernard Bardon. Il est de la race des éternels grands jeunes hommes, avec son épaisse chevelure noire et son air effaré d’être là. D’ailleurs, avant l’audience, où pendant les suspensions, il ne se mêle pas aux autres prévenus, il confère avec son conseil ou reste seul, appuyé à la balustrade du grand escalier. Pour un peu on le plaindrait. Mais basta ! Comme dirait Xavière. Bardon, ce n’est pas que ça : militant étudiant , il rencontre Tiberi en 1974 et colle ses pas dans les siens. Donc l’UDR puis le RPR. On lui confie le secteur de la jeunesse : à la Fédération de Paris puis au Conseil National. Monsieur Bardon n’a plus le temps d’étudier le droit, au bout de deux ans, il quitte la fac et devient agent administratif contractuel, puis officier municipal en 1980 chargé de la jeunesse et des sport, dans le 5e. Après la réforme qui donne un Maire à Paris, il est de 83 à 89, le collaborateur de Jean Tiberi qui est lui, maire du 5e, adjoint de Jacques Chirac et député. Aux élections suivantes dans le cinquième, il est sur la liste Tiberi. Il y retrouve Madame Affret, Madame Bach, Monsieur Baecht… Les mêmes qu’aujourd’hui, comme dit Xavière « on ne change pas une équipe qui gagne ». Elu, il sera Conseiller de Paris, collaborant avec l’adjoint en charge de la jeunesse et des sports.
Voici, Jacques Chirac, président, l’élection de Jean Tiberi à la Mairie de Paris. Pour le remplacer dans le 5e, Bardon est élu… Le parcours est jusqu’ici sans faute. Mais, n’est-ce pas une progression en trompe l’œil ?
A la barre, il apparaît soudain comme un homme totalement désabusé. Il dit de lui-même qu’il « était un maire de transition, une potiche. J’avais dans mon Conseil d’arrondissement, le maire de Paris également député, mon inexpérience à côté de lui était flagrante. Du reste l’administration, que ce soit à l’Hotel de Ville ou à la mairie du 5e le savait bien. J’étais mis en retrait ». Il cite de pathétiques exemples, des invitations de la Mairie du 5e où son nom ne figure pas, des inaugurations dans l’arrondissement où il ne peut pas prendre la parole. Alors il se cantonne dans le fonctionnement : crèches, Centre d’Action sociale, écoles…Et il dit que Bernard Nantien en le qualifiant de potiche, a exprimé le sentiment général.
Le bureau des élections ? Il n’y passait jamais, pourquoi faire ?. Il n’allait jamais non plus à la permanence de Madame Affret sauf pour demander des places pour les matches de foot. Lui avait un bureau mais pas de permanence.
- Mais enfin s’agace le président vous étiez le maire élu !
Bardon ne répond pas. Il explique que la permanence de Madame Affret, était aussi celle de Jean Tibéri comme parlementaire et que tout ce petit monde « vivait en autonomie ». Quant à lui, son bureau était occupé par Xavière Tiberi lorsqu’elle venait à la mairie et que lui n’y était pas, mais il précise : « La femme du Maire de Paris était chez elle partout ! ». Que Xavière et Anne-marie Affret soient décrites comme « les deux bras droits de Tiberi », il l’admet volontiers. Du reste, il ne voyait pas de limites aux compétences de la première adjointe. Après un temps de silence embarrassé, il ajoute « je ne voyais pas le moyen de m’y opposer. Cette équipe, ce fonctionnement a perduré. Il était comment dire « dans les murs ». Cette fameuse « permanence » apparaît peu à peu comme le centre vital de la mairie.
Sera-ce le système de défense de Bernard Bardon, celui qui consiste à dire : « Je n’avais aucun pouvoir, j’ai tout vu sans pouvoir faire quoique ce soit puisque je n’étais pas dedans ? ». A l’appui de cette thèse, le fait qu’il n’a choisi ni sa chef de cabinet, Jaqueline Mockriky, qui lui a été imposé directement de l’Hôtel de Ville, ni ses adjoints. Tout le monde prenait ses ordres là bas. « Par exemple les arbitrages budgétaires qui auraient du m’incomber étaient faits par madame Mockriky en accord avec Jean Tibéri » !
Quand éclate l’affaire, il subit cette « ambiance pesante, les perquisitions, les allées et venues des gendarmes, les camionnettes qui chargent les dossiers et la garde à vue. Monsieur Nantien s’est ouvert à moi, plutôt un appel au secours. Je lui ait dit « Vous connaissez mon poids ! ». Il était brisé par ce qui lui arrivait. Il a dû vouloir en parler avec Monsieur Grammond chef de cabinet de Jean Tibéri à l’Hôtel de Ville mais je ne me souviens pas s’il l’a réellement fait.
Ensuite les avocats des parties civiles lui demandent s’il a désigné les membres des commissions électorales le représentant et ses adjoints, s’il a attribué des logements, s’il a fait des interventions… C’est non chaque fois. Quant à remplacer l’équipe de Tibéri par la sienne, il affirme que c’était hors de question : « Je n’avais aucun moyen pour le faire et Tibéri reviendrait, je le savais ! ». Et la présence de Xavière Tiberi ? « Je la subissais ! ».
Aujourd’hui, Monsieur Bardon est directeur adjoint de la Maison de la France à Stockholm !

Avec Bardon, s’achève une première partie d’interrogatoire, celle des « petites mains », ceux qui étaient aux ordres. On y voit des militantes enthousiastes comme Farida Sahnoune, et Madame Havre, d’autres plus désabusés comme Bardon, des fonctionnaires zélés comme Jaqueline Mockriky et même Raymond Nantien si bourrelé des remords soit-il, ou Mercier dont on sent qu’elle était totalement dépassée, d’autres qui ont tracé leur chemin de bureau en bureau, à l’ombre des murs de la mairie du 5e comme Olivier Fabre. Si différents soient-ils, ils ont tous un point commun : ils étaient des obligés de Jean Tiberi. Est-ce peu courant ? Non probablement. Dans toutes les mairies, les édiles s’attachent des équipes. Mais dans le système Tiberi, on a bien vu que cet attachement se payait d’une acceptation de pratiques obscures et d’un silence…complice.

MILITANTE DE CHOC ET BILLEVESEES
La prestation de Xavière Tiberi, est attendue comme celle de la prima donna, et elle le sait. Donc, la voici à la barre, ramassée sur elle-même, repoussant son manteau trois-quarts sur les épaules, et d’un signe, portant sa main à l’oreille indiquant au Président qu’elle n’entend pas bien. A celui-ci, qui lui demande de définir son rôle, elle rétorque bien campée sur les deux jambes :
« On me prête un pouvoir que je n’ai jamais eu. Je suis une militante de choc. Le reste, ce sont des fariboles ! J’ai entendu tellement de mensonges que j’en ai des pulsations….Je suis sur le terrain, un électron libre depuis plus de 50 ans ! Quand Tiberi voulait être maire de Paris en 1994, j’ai sillonné les rues de Paris avec les élus, je suis allée dans les maisons de retraites, dans les logements sociaux. Mais ce n’est même pas moi qui ait constitué un comité de soutien. »
Curieusement, elle dit « Tiberi » plus tard « Jean » mais rarement « mon mari »…
Elle explique qu’une fois son époux élu, elle avait de multiples obligations de représentation et qu’elle n’avait pas le temps d’aller dans le 5e sinon de temps à autre.
- Qui était votre chauffeur ?
- Je n’avais pas de chauffeur, je n’avais pas de bureau, je rendais simplement visite à tout le monde. Mensonges ! Mensonges ! Mensonges ! Deux personnes m’accusent l’un parce que Jean a été trop gentil avec lui et l’autre parce qu’il voulait être calife à la place du Calife ! »
Elle désigne ainsi Nantien et Bardon, dont on lui fait observer qu’il était en effet calife à la place du Calife puisqu’il était maire du 5e.
Elle hausse les épaules. « Bardon, c’est n’importe quoi ! J’allais le mercredi m’occuper des crèches. Les crèches ça m’intéresse ».
Et puis du coq à l’âne, elle lance : « Tiberi est parti de la mairie de Paris, plus pauvre qu’il n’y est rentré ! »
Enfin, après qu’on lui ait demandé si elle connaissait Olivier Fabre (« Je le croisais, toujours très poli… », elle dit que lorsqu’elle arrivait, le courrier était déjà dispatché ! Lorsqu’on lui demande son avis sur madame Mercier : « Elle n‘était pas ma secrétaire ! Elle a toujours fort bien fait son travail, aimable compétente, je l’entendais répondre au téléphone toujours très bien. ».
Le Président voudrait comprendre la différence entre la permanence et les bureaux. Ce n’est pas très clair dans son esprit, ni dans le nôtre d’ailleurs. Mais apparemment, dans l’esprit de l’équipe de Tiberi, ça n’a rien de compliqué !
Xavière explique qu’il y a une permanence politique et une permanence de l’élu et une salle d’attente. Elle trace dans les airs une configuration idéale. La permanence du maire celle de l’élu, « les militants viennent y coller des enveloppes, pour les invitations aux expositions aux concerts… ». Xavière précise : « c’était une équipe extraordinaire Mr Mondain par exemple très cultivé, très méticuleux est venu m’aider à la Mairie de Paris. Je ne sais pas ce qu’il faisait dans le cinquième, Homme à tout faire ? Ah non sûrement pas ! ».
Madame Mockriky ? Elle est arrivée très jeune mais c’est une grande travailleuse. Je ne l’ai jamais surprise à faire autre chose que son travail. Elle n’a pas fait carrière (sic) de secrétaire, elle est devenue chef de cabinet.
Madame Affret ? « Ah, Madame Affret ! Elle a consacré sa vie au cinquième arrondissement ! Tous les jours, samedi et dimanche compris ! Elle est charitable, intègre,, elle est partout. Elle est née avec le sens de la communication. Je l’accompagnais dans les rues, chez les commerçants, tout le monde la connaît !
Xavière tressant des couronnes à son amie est brutalement interrompue par le président :
- On a dit que vous vous parliez en corse et en italien
- Ah mais le corse et l’italien n’ont rien à voir ! Il n’y a pas de connivence dans le parti de mon mari. Mais il suffit qu’on ait un nom en I, ou en A pour être suspect !
- Justement madame Affret, remarque le président, un peu dépassé par le torrent Xavière, madame Affret c’est ET…
Mais Xavière ne l’entend pas. Elle rappelle ces moments agréables où pour oublier un peu le vrombissement de « la ruche », elle et Anne Marie Affret s’isolaient pour boire un thé dans la petite cuisine qui jouxte la permanence.
- Et rue Vésale vous y alliez ?
- Ah du matin au soir !. J’étais une militante de base ! Et du coup j’ai été le maillon faible qu’il fallait abattre.
Puis elle demande à boire, annonce que sa tension est à 18 ! Jaqueline Mockriky qui même au tribunal n’oublie pas son rôle, lui sert à boire.
Le Président après lui avoir demandé comment elle a vécu l’affaire, l’entend répondre que la seule personne qui n’ait pas tourné le dos à Jean, est le Président Sarkozy et qu’elle-même a été traînée dans la boue. Alors, il l’abandonne aux avocats de la partie civile.
Ceux-ci lui citent des réflexions des autres prévenus tendant à prouver qu’elle avait un poids important dans la gestion de la mairie du cinquième. Elle s’insurge :
- Billevesées ! Mensonges ! Comment pourrais-je diriger une mairie ? Il y a des commissions, des prud’hommes, des syndicats, des fonctionnaires ! (sic !) Et les fonctionnaires sont les fonctionnaires ! Ce sont des mensonges proférés par les juges et les gendarmes. Je ne suis rien, je suis une subalterne. Et je ne vois pas pourquoi je n’aurais pas pu aller saluer des gens que je connais depuis trente ans !
- Alors dit l’un des avocats, c’est une cabale ?
- Cabale ? Mensonges, peu importe ! Appelez ça comme vous voudrez !
- Et les secrétaires généraux, vous les avez tous connus. Vous avez parlé de tous sauf de Madame Tremblay !
- Ah Madame Tremblay, parlons-en ! Elle pleurait tous les matins !

Et puis Madame Tiberi Xavière, va se rasseoir. Le président décide une suspension de séance. Dans le hall, deux avocats de la défense se retrouvent.
- Alors dit l’un qui vient d’arriver, comment ça s’est passé ?
- Moyen, dit l’autre, très moyen !

PREMIERE ADJOINTE 24H24
Voici venu le tour d’Anne-Marie Affret, elle est au cœur du système, du moins c’est ce que tous les prévenus ont déclaré. Elle va, à son corps défendant, tout –ou presque corroborer. Cette petite femme, dure à la tâche, volontaire énergique se cramponne à la barre. Comme la plupart des prévenus, sa formation est minimale : vendeuse en parfumerie rue Mouffetard et militante UDR puis RPR. Elle rencontre Jean Tiberi et fait campagne pour lui. Elle explique et c’est confus qu’elle « n’avait que ça à faire »
Elle est sur sa liste en 1983, et grimpe les échelons : conseillère d’arrondissement puis adjointe. Une opération des coronaires l’arrête trois mois et ensuite elle aura une « petite pension d’invalidité ». Invalide mais pas ingambe, elle parcourt l’arrondissement, mobilise les commerçants : « Monsieur Tibéri m’a nommée adjointe car j’avais besoin d’un salaire ! ». En 1984, elle devient 1ere adjointe ce qu’elle est encore aujourd’hui. Que Jean-Charles Bardon ou Jean Tiberi soit maire, « j’avais toujours affaire à Jean Tibéri. C’est naturel ! »
- Naturel ne signifie pas automatique observe le Président.
- Si dans certains cas rétorque-t-elle.
Sur ses relations avec le personnel de la Mairie, elle dit avoir toujours eu de bonnes relations avec tout le monde, avec le Secrétaire général Raymond Nantien « on dînait ensemble et même une année, nous sommes partis en vacance ensemble en tout bien tout honneur et avec ma mère ! »…Mais d’après elle, il était très minutieux, tout devait passer par lui, « tous les papiers ». Elle n’allait jamais au bureau des élections, elle connaissait vaguement Olivier Fabre qui descendait à sa permanence pour demander des places de foot.
Le mot « permanence » lâché, le Président s’en empare. Il veut absolument connaître la configuration géographique du lieu et son sens : est-ce le bureau de madame Affret ou la permanence de l’élue ? Les explications de l’intéressée sont si longues et confuses que les minutes qui passent ne servent qu’à accroître la confusion. Il ressort malgré tout que c’est cœur du système. Le Président finalement renonce et revient aux relations qu’elle entretient avec l’ensemble de la mairie « Bonnes, excellente » assure-t-elle. Ajoutant qu’il n’y a qu’à le demander aux 60 000 habitants de l’arrondissement ! « Ils ne seront pas tous à la confrontation » soupire le Président.
- Que pensez-vous de la remarque de Monsieur Nantien, à savoir vous étiez avec Xavière Tiberi les deux bras droits de Jean Tiberi ?
- Je ne vois pas ! Je suis élue, je travaille vingt quatre heures sur vingt quatre, je me dévoue aux électeurs, aux gens âgés…Un flot de paroles submerge l’audience, le président a du mal à faire barrage.
- Madame Affret de détournez pas les questions !
- Et madame Tibéri que faisait-elle ?
- Elle venait m’aider pour les crèches. Mais pas tout le temps, moi j’étais beaucoup dans la rue à voir les commerçants…Et le flot repart sur les bonnes, les excellentes relations avec les électeurs…Et si elle a un bureau, ce n’est pas vraiment le sien mais comme elle est là tout le temps, il lui faut un endroit.
Parfois, on hésite. Anne-Marie Affret noie-t-elle le poisson ou bien est-elle vraiment une bavarde compulsive ? Elle parle, se contredit, change de sujet, s’arrête, repart..Ainsi sur Annick Mercier :
- Elle n’était pas ma secrétaire, elle travaillait pour la mairie. Elle gérait l’emploi du temps, le mien puis elle répondait au téléphone et classait toutes les demandes d’interventions. Elle faisait le courrier. Moi je ne sais pas taper à la machine et je ne signe rien. La seule délégation que j’ai c’est pour les certificats d’hébergement !
Puis elle parle de son interrogatoire par le juge d’instruction, de la difficulté d’être une femme seule, de sa santé…Le Président lève la main :
- Le Tribunal est fatigué ! on ne comprend plus rien. Quelle est l’activité de l’élu, quelle est celle de la mairie ?
- Il y a trois permanences…
- Ah non ! Maintenant, nous nous retrouvons avec trois permanences ? Une suffit.
- Mais Monsieur le président, c’est trois par semaine, il y a le mercredi, le jour de la petite enfance avec Madame Tiberi…
Autres explications, elle admet enfin un distingo entre permanence et bureau et la présence à celui-ci de Murielle Aja, sa nièce, Annick Mercier, Patrick Mondain et un huissier Lucien Bertoliatti. Elle dit qu’elle voyait très peu Xavière Tiberi !
- Vous fait-elle peur ? Vous avez dit quelque chose à ce sujet au Juge d’instruction.
- Je n’ai peur de rien, je ne m’agenouille que devant Dieu.
Pour la première fois, madame Affret ne rajoute rien et la salle souffle un peu.
Mais lorsqu’on évoque la perquisition à la mairie et chez elle madame Affret redémarre, aussitôt arrêtée par le Président :
- On vous désigne comme la cheville ouvrière…
- Je travaille beaucoup et je suis contente de faire ce travail pour les citoyens pauvres de cet arrondissement (s’ensuit une description sociologique de l’arrondissement d’où il ressort qu’il y a des pauvres, plus qu’on ne croit). Je suis ravie d’être comme je suis, j’ai du caractère et ça m’a servi. J’ai traversé des épreuves et je les ai surmontées, maintenant j’ai bien réussi !
On évoque ensuite les relations avec Jean Tiberi. Oui, il lui faisait confiance, oui c’était carte blanche si on veut mais elle rendait compte de temps en temps… Mais elle n’était pas une amie du couple : « nous ne sommes jamais partis en vacance ensemble par exemple ».
La mémoire de Madame Affret vacille parfois sur les dates, les lieux, les réunions bref, elle travaillait au service de tous et du maire en particulier mais elle n’était rien et n’avait aucun pouvoir !

LE MAIRE
Son patron Jean Tiberi lui succède. Il se tient droit, les mains croisées derrière le dos et le ton qu’il prend est celui de l’élu de haut niveau qui consent à tout expliquer pour éclairer le malentendu qui l’amène parmi les prévenus. Il est toute indulgence pour son personnel, il donne sa confiance sans restriction et rappelle qu’il a été élu et réélu avec suffisamment d’avance pour que cette histoire de faux électeurs n’ait aucun sens ! Sur le pouvoir qu’il exerçait sur la mairie du 5e, il explique que comme parlementaire et maire de Paris, il était déjà débordé et se reposait justement sur Bardon dont il pensait qu’il jouerait le jeu. « Je crois qu’il n’a pas compris son rôle. » conclut-il. Sur Anne-Marie Affret, il est plus précis :
- Je la connais depuis longtemps, j’ai confiance en elle car elle travaille à temps plein ce que bien des élus ne font ou ne peuvent pas faire. Mais je ne lui ai jamais donné d’ordres, ou d’indications de choses à faire ou ne pas faire.
- Vous lui laissiez une liberté totale ?
- Totale ! Elle m’informait, elle connaissait mes priorités. Le cinquième est l’arrondissement sur lequel je veille le plus !
Il n’est jamais venu à la permanence, il connaît à peine tout le petit monde qui gravite autours. Quant à Monsieur Nantien, il ne lui a jamais demandé de revenir, « C’est au contraire, lui qui m’a sollicité. Il voulait le logement de fonction. C’est naturel ! ».Le président laisse passer de longs silences. Peu à peu Jean Tibéri est moins détendu, il se passe la main sur le visage, boutonne et déboutonne sa veste.
Le Président revient sur ses relations avec Madame Affret et insiste sur la liberté dont elle jouissait.
- Elle savait tout ce qu’il fallait faire, inutile de me le demander ou de me dire ce qu’elle faisait, ça allait de soi ! Elle me rendait compte oralement, nous nous voyions sur le terrain, les week end.
Ensuite, il défend sa femme : « Mon bras droit, ma femme ? Je ne comprends pas. Elle était militante, elle allait dans la rue avec Madame Affret. Parler d’omniprésence est une contre-vérité, on laisse penser cela pour se disculper. Elle intervenait très peu, et comme épouse du Maire elle me représentait.
Finalement on en vient à l’affaire et ce qui s’est passé lorsqu’elle a éclaté :
- C’était un drame, j’étais abasourdi ! Même si je venais peu, j’étais au conseil d’arrondissement, Raymond Nantien aurait pu m’en parler !
- Mais observe le président, vous n’avez pas demandé des comptes, diligenté une enquête interne ?
- Je m’en suis bien gardé. C’aurait été m’immiscer dans les affaires de l’administration. Toute intervention aurait été interprétée, je me suis gardé de toute démarche écrite ou orale. J’étais peiné pour ceux des employés qui vivaient cette épreuve mais je ne pouvais faire aucune démarche à partir du moment où l’enquête a démarré ! Il fallait préserver l’indépendance de la justice !
C’est le système de Jean Tibéri : faisant confiance à de fidèles collaborateurs, il a été consterné par cette affaire mais a gardé le silence…Ceci mise à part, il a rappelé tout de même à quel point il a été un bon élu, il a énuméré ses réalisations et les bonnes relations qu’il entretient avec ses administrés…A plusieurs reprises, un discours de campagne maintes fois répété.

mardi 10 février 2009

Un exemple de conseil de quartier : Nogent sur Marne

Le conseil est composé au maximum de 15 membres répartis en 3 collèges :
Le collège des élus, composé de l’adjoint de quartier désigné par le maire et d’un représentant identifié de chaque groupe politique minoritaire du conseil municipal ;
Le collège des entreprises, commerçants et artisans, composé de 3 membres maximum ;
Le collège des habitants.
La durée du mandat est de deux ans renouvelable une fois, dans la limite du mandat municipal en cours.

Le bureau du conseil est composé d’un président délégué, d’un trésorier, d’un secrétaire général et de l’adjoint du quartier. Les membres du collège des élus ne sont pas éligibles aux fonction de président délégué, trésorier et secrétaire général. Ils ne prennent pas non plus part au vote. L’adjoint de quartier préside le conseil avec l’aide du président délégué élu.

Les conseils de quartiers ont accès aux salles municipales et équipements municipaux nécessaires à l’organisation de leurs réunions. Ils disposent d’un espace dans le journal municipal et sur le site internet de la ville. Ils peuvent mettre en œuvre des moyens d’information complémentaires s’ils le jugent nécessaires et cela avec l’aide des services municipaux.
A terme ils disposeront d’un espace Extranet auquel les habitants pourront accéder pour y déposer leurs contributions.

Les conseils de quartiers peuvent solliciter la présence de représentants des services municipaux à leurs réunions s’ils le jugent utile. Bien sûr cette participation reste soumise à l’autorisation du maire et du directeur général des services de la ville.

Le conseil de quartier est libre de déterminer la fréquence de ses réunions. Il doit néanmoins se réunir au moins 4 fois par an. Le maire et /ou l’adjoint de quartier peuvent réunir le conseil quand ils le jugent nécessaire ou enfin quand les 2/3 des membres du conseil le demandent.
Les réunions des conseils de quartier sont ouvertes au public.

L’ordre du jour est établi conjointement par l’adjoint de quartier et le président délégué après consultation des membres du bureau. La convocation accompagnée de l’ordre du jour est adressée aux membres du conseil 15 jours avant la date de la réunion. Elle est affichée en mairie et fait l’objet d’une information sur le site internet de la ville.

Chaque réunion fait l’objet d’un procès-verbal rédigé par le secrétaire général et signé par l’adjoint de quartier et le président délégué.

Les conseils de quartiers sont libres de mettre en place s’ils le jugent nécessaire des commissions thématiques ou groupes de travail temporaires.

Le conseil de quartier établit chaque année un rapport d’activité qui fait l’objet d’une présentation lors des rencontres de quartier et au conseil de la ville. Le rapport d’activité est ensuite soumis à l’approbation par délibération du conseil municipal.

LES INSTANCES DE LA CONCERTATION A PARIS

122 conseils de quartier Les conseils de quartier sont des lieux d'information, d'écoute, de débats et d'expression concernant les projets d'aménagement du quartier, la vie de quartier ou encore l'amélioration du cadre de vie.
Un conseil de la citoyenneté des parisiens non communautaires Installé le 12 janvier 2002, le conseil permet à 170 000 Parisiennes et Parisiens âgés de plus de 20 ans, exclus du droit de vote, de se sentir enfin reconnus, entendus et d'exprimer leur sentiment d'appartenance à leur ville : Paris.
Les Conseils de la jeunesse , le Conseil Parisien de la Vie Etudiants, lieux de dialogue privilégié entre la jeunesse, le monde étudiant et la Mairie de Paris. Les étudiants investis dans le conseil sont invités à examiner la politique municipale et proposer de nouvelles idées. Le conseil se saisit de toutes les questions qui l’intéressent et soumet un rapport au Maire ou son adjoint, lors de séances plénières.
20 Comité d’Initiative et de Consultation d’Arrondissement (CICA)Crées par une loi de décembre 1982 ces instances visent à associer les associations à la vie communale. S'y inscrivent les associations qui le désirent pour réfléchir et travailler ensemble sur des thèmes qu’elles choisissent. Parallèlement, le maire doit, d’une part, leur fournir toutes les informations dont il dispose sur les thèmes choisis, d’autre part, organiser une réunion trimestrielle du conseil d’arrondissement à laquelle les responsables des associations viennent exposer leur travail et demander éventuellement une délibération du conseil d’arrondissement.
Par ailleurs, des conseils d’enfants et d'anciens ont été mis en place dans certains arrondissements, tels les 9 et 20ème arrondissements. Une commission consultative des services publics locaux : la Mission Démocratie Locale a mis en place et assure le secrétariat de la commission consultative des services publics locaux, commission prévue par la loi de 2002 relative à la démocratie de proximité.Cette commission est composée d'élus et de représentants d'associations d'usagers. Elle a pour objet d'étudier et de rendredes avis, sur le principe d'opportunité de délégation de service public locaux soumis au Conseil de Paris. Des référendums locaux tels ceux réalisés autour du projet "carreau du temple" dans le 3ème arrondissement ou celui de l'avenue Jean Jaurès dans le 19ème arrondissement.

Forum sur la Charte parisienne de la participation

6 février 2009 à la Mutualité, à l’invitation de ville de Paris et notamment de M. Hammou Bouakkaz, adjoint au maire de Paris chargé de la démocratie locale et de la vie associative, un forum s’est tenu vendredi 6 février au soir à la Mutualité. Il prépare l’adoption de la future charte parisienne de la participation qui s’inscrit dans un processus qui a débuté en 2001 avec le souhait de la ville de Paris d’associer davantage les citoyens et les usagers de Paris à la vie de la cité et aux actions publiques. De nombreuses instances de participation ont été mises en place: 121 conseils de quartiers réunissant plus de 4 000 personnes, des conseils de jeunes, de sages, de Parisiens non communautaires et même d'enfants dans certains arrondissements…. En terme de moyens, 20 maisons d'associations et la Maison des initiatives étudiantes offrent aux Parisiennes et Parisiens des espaces ressources pour accompagner, soutenir et valoriser la vie associative locale et l'initiative citoyenne.

Il s’agit de faire en sorte de tenir compte de l’avis de l’ensemble des acteurs de la vie parisienne de donner la parole à tous ceux qui y vivent même s’ils ne sont pas ressortissants de l’union européenne et non pas le droit de vote aux municipales. Les conseils de quartier répondent à cette préoccupation mais les règles de désignation de leurs membres varient d’un arrondissement à l’autre entre le tirage au sort sur la base des candidatures reçues ou à l’inverse en associant l’ensemble des personnes qui souhaitent venir y travailler. Une majorité d’arrondissements abandonne le tirage au sort pour ouvrir les travaux au plus grand nombre.

Comme l’a noté Hamou Bouakkaz, les prises de parole émanant de personnes d’arrondissements d’opposition à la majorité municipale étaient rares. En effet, mis à part des réactions venant d’habitants du 16ème arrondissement souhaitant une consultation par référendum des citoyens sur les investissements réalisés dans leur quartier, peu de voix discordantes se sont élevées. A ce propos, comment fonctionne la participation dans le 5ème arrondissement ? Ce sera l’objet d’un prochain article.

Prochaines étapes :
Jusqu’à fin février 2009, chacun peut remplir le questionnaire disponible sur le site de la ville de Paris :
http://www.paris.fr/portail/accueil/Portal.lut?page_id=8980&document_type_id=4&document_id=61291&portlet_id=21732&multileveldocument_sheet_id=12120
Mars 2009
Rédaction de la Charte parisienne de la participation à partir de toutes les contributions.
4 avril 2009
Présentation de la Charte aux contributeurs à l'occasion du Printemps de la démocratie locale à l'Hôtel de ville.

vendredi 6 février 2009

Procès Tiberi 3éme journée : les employés de la mairie

Erratum.
Hier, nous avons commis une erreur sur le prénom et le nom de Monsieur Nantien : il s’appelle Raymond et non Bernard. Toutes nos excuses à nos lecteurs et à Monsieur Nantien

Comme l’a annoncé le Président, il s’agit de présenter les acteurs de cette affaire, de dresser le décor, l’ambiance et les structures de la marie. Les précisions sur l’affaire elle-même viendront plus tard, dans d’autres interrogatoires, et des confrontations.
Voici donc les petites mains, les employés modèles. Au fur et à mesure qu’ils se présentent à la barre, la stupeur mêlée d’incrédulité laisse peu à peu place au sentiment chez chaque spectateur citoyen du 5e d’avoir été quotidiennement floué !

UN SPORTIF AU BUREAU DES ELECTIONS

Le premier est Olivier Fabre. Il range discrètement le chewing-gum qu’il ne cesse de mâchonner mécaniquement depuis le début du procès et se tient légèrement appuyé, dans une pose faussement décontractée. Monsieur Fabre 46 ans a débuté à la Mairie de Paris comme animateur vacataire, puis il a passé un concours pour être agent administratif catégorie C avec comme premier poste, le service de l’état-civil à la mairie du 5e. Il a fait toute sa carrière à la mairie. Il se dit « autodidacte et sportif ». Cheveux ras, grand, mince dans son T-shirt à manche longue col en V, il affiche une certaine aisance d’allure. En 1987, il a demandé à être muté au bureau des élections parce que « l’état-civil au bout d’un moment ce n’est pas très intéressant » ! Il dit avoir été « formé sur le tard » (sur le tas ?) par sa chef Madame Leclerc. A l’époque, la secrétaire générale était madame Tremblay, celle ci n’est pas restée longtemps.
-« Elle a été évincée » avez-vous déclaré observe le Président.
Un long silence suit. Il hésite. Le Président insiste et lui demande d’expliquer ses mots. Il cherche un long moment et finit par dire :
-C’était une querelle de femmes entre Madame Tibéri et madame Affret d’une part, madame Tremblay d’autre part.
On n’en saura pas plus. On lui demande des précisions qu’il donne laborieusement : Les deux personnes décisionnaires à la mairie étaient madame Affret et madame Tibéri. Il dit n’avoir pas vu de conflit mais d’une manière sibylline ajoute : « juste la présence physique suffit à déstabiliser ! ».
Olivier Fabre voit se succéder les chefs à son bureau : madame Leclerc, puis un autre puis encore madame Leclerc puis finalement, en 1992, Monsieur Morisset qui sera remercié par Raymond Nantien. « Pour quelles raisons à votre avis ? » s’enquiert le Président.
-Il venait des services centraux, et sa carrière était importante. Il n’avait jamais eu affaire à des élus et il avait des problèmes avec la hiérarchie, il ne trouvait pas sa place. Il est parti en 1993.
Après son départ le poste reste vacant un an. Puis il est nommé chef en mars 93. Comment ?
- Tout naturellement, j’étais le plus ancien, j’avais été formé depuis le temps que j’occupais le poste. Et puis pendant que le poste était vacant, je faisais fonction de chef. Nous étions tous, les quatre personnes du bureau, de catégorie C .
- Il n’y a donc pas de recrutement extérieur ?
- A Paris, en général, ces postes ne sont pas très courus. Ils sont en général pourvus en interne. Mais en tant qu’animateur et sportif, j’ai l’esprit d’équipe et une autorité naturelle, je suis un meneur d’homme, je répartissais les tâches, je tenais l’équipe en cohésion.
- Et Monsieur Nantien avait l’aval du Maire ?
- C’est certain ! Il ne prenait aucune décision sans en aviser le Maire.
- Vous saviez comment Monsieur Nantien qui était parti dans le 14e était revenu secrétaire général de la mairie ?
- On n’en a jamais parlé. Ca me semblait naturel.
Le mot naturel revient souvent dans la bouche de Monsieur Fabre. Pour lui, ce qui est naturel semble procéder d’une règle non écrite et incontournable. Ce qui naturel est imprescriptible.

UNE ADRESSE EMBLEMATIQUE ET DEPRIMANTE

Or l’animateur si tranquille, si équilibré, le sportif « de catégorie régionale », ( il ne dit pas dans quelle discipline) change complètement au moment où éclate l’affaire judiciaire. Il raconte :
- La moutarde montait à la mairie ! J’ai senti qu’il fallait que je parte. Il y avait une pression psychologique ambiante, il me fallait l’aval de ma hiérarchie pour obtenir ma mutation et je n’étais pas certain de l’obtenir !
- Comment avez vous fait ?
- Sur un coup de tête, j’ai pris un mois de congé puis trois mois d’arrêt de maladie. . Nous avions subi une perquisition très éprouvante, très longue. Mon fond intérieur me dictait de partir.Je suis parti du jour au lendemain sans prévenir personne. Psychologiquement, je ne pouvais plus monter les marches du grand escalier à cette adresse emblématique
Olivier Fabre, quitte la mairie en 1999, retrouve un poste à la direction de la vie locale et régionale mais n’évite pas une garde à vue en 2000.
Il est ensuite interrogé sur son cursus : brevet d’animateur puis agent administratif, sur concours. Pas d’autres études. Il l’a dit et il le répète : « formation sur le tard ! ». Mais connaît-il le Code électoral ? Non il ne l’a jamais lu. Les inscriptions automatiques ? Il lui faut un moment pour se souvenir « qu’il doit s’agir des jeunes mineurs ayant atteint 18 ans mais c’est assez compliqué à appliquer ! » et la Circulaire ministérielle de 1980, remise à jour en 2002 ? Il sèche lamentable et avoue finalement « je l’ai sûrement vue ! »
- Finalement dit le Président à quoi sert le bureau des élections ?
- A recevoir les gens qui veulent s’inscrire, à tenir à jour les listes suivant les décisions des commissions administratives.
- Justement comment étaient elles composées ces commissions administratives ?
Il explique puis ajoute « en général, comme dans tous les arrondissements, on a du mal à trouver des gens alors on demande au maire s’il connaît des gens ».
-Mais alors, si les membres des commissions étaient choisis par le maire, ils allaient dans son sens ?
Fabre confirme : « Ah oui, c’était une chambre d’enregistrement ! ». On lui demande encore s’il sait s’il y a des incompatibilités pour nommer les membres de la commissions et il bat en retraite « Honnêtement ce n’est pas ma partie ! ».
Mais enfin s’impatiente le Président, vous avez bien du vous former ? Suivre des stages ?
Oui ! Un stage d’informatique pour un logiciel de saisie !
Dans la salle, on avait d’abord souri, puis peu à peu, l’idée que ce chef du bureau des élections exerçait sans aucune formation apparaît clairement et il y a comme une sourde rumeur que le Président fait taire illico.
Alors on passe aux relations avec la Mairie :
-Jean Tibéri ? Je le voyais très rarement, Ce n’était pas un maire très proche du personnel. Il ne passait jamais au bureau serrer des mains. Je le rencontrais à la cérémonie de début d’année pour les employés de la mairie.
Madame Affret ? Comme première adjointe et présente tous les jours, elle était proche des employés et amicale mais elle ne s’immisçait pas dans les affaires du bureau.
- Vous avez entendu Monsieur Nantien parler de madame Tibéri et madame Affret comme les « deux bras droits de monsieur Tibéri » qu’en pensez vous ?
Madame Affret jouait son rôle d’élue, madame Tibéri celui de l’épouse et porte-parole du Maire.
-Elle donnait des ordres ?
-C’est femme forte, forte tête. Quand elle avait quelque chose à dire, elle le disait ! Je n’étais pas au courant de tout mais je pense bien qu’elle s’immisçait dans tous les dossiers.
De longs silences, des hésitations, des mots vagues comme « en général « , « naturellement », « ambiance »…Il s’accroche parfois à la barre, parfois agite les doigts de manière complètement machinale. On a l’impression qu’il hésite sur les pans de vérité à dévoiler et ne sachant pas, se contente du minimum.
Son long interrogatoire laisse entrevoir, une petite population d’employés aux ordres avec des intermédiaires plus ou moins informés. Lui s’attache à apparaître comme un chef de bureau sérieux, renvoyant les responsabilités sur Raymond Nantien, son adjointe Véronique Bourgeix et Anne-Marie Affret mais il ne serait-il surtout le dindon d’une farce qui dure depuis plus de quinze ans.

DU PROTOCOLE A LA PERMANENCE

Patrick Mondain, 56 ans, lui succède. Il a débuté comme agent contractuel à la Ville de Paris au service du matériel. Chiraquien, militant RPR, de 1980 à 1993, il était au service du protocole à la Ville de Paris comme adjoint technique. Grand, cheveux gris, costume bleu bien coupé, il possède toute l’élégance de l’emploi. En 1993, le voici affecté au service de Anne-Marie Affret et il a nettement le sentiment d’un déclassement. Il était « l’homme à tout faire, le chauffeur, le coursier ». Il accompagne la première adjointe dans l’arrondissement, s’occupe de l’acheminement des enveloppes qu’il s’agisse du bureau ou de la permanence « qui forment un tout ». Il voyait de temps à autre Madame Tibéri mais celle-ci lorsqu’elle venait voir madame Affret s’isolait avec elle dans un autre bureau. Il a néanmoins surpris « des conversations en corse ou en italien ». Selon lui, madame Affret jouissait « d’une grande liberté d’action pour des tâches très diverses et n’en rendait compte qu’au Maire et n’en faisait qu’à sa tête. Son bureau était une ruche avec des bénévoles qui passaient ». Patrick Mondain étant militant RPR fréquente aussi la permanence de monsieur Tibéri, rue Vésale où se rend parfois madame Affret. Il garde un mauvais souvenir de celle-ci : « Une exaltée qui passait ses humeur sur moi qu’elle traitait comme son larbin. Enfin, c’est une Italienne au sang chaud ! ».
En juin, 1995, Jean Tibéri devenu maire de Paris, Patrick Mondain est enchanté de quitter « la ruche et l’ambiance étouffante du 5eme », pour entrer au service de madame Tibéri. Il tient son agenda, gère son courrier et les demandes qu’elle reçoit.
On peut se demander si ce grand escogriffe, très digne a trempé dans la fraude, pour l’heure on ne lui demande que des détails : « Oui, j’ai eu à remplir des formulaires quand j’étais sous la coupe de madame Affret ».
- Sous la coupe ? s’étonne le Président.
Mondain visiblement se demande s’il a dit le mot juste, s’il n’a pas exagéré. Il réfléchit.
- Je dépendais d’elle, on ne discutait pas ses ordres de toutes façons !

Aujourd’hui, Patrick Mondain après avoir connu son heure de gloire en étant chef du protocole pour les réceptions privées lorsque Jean Tibéri était à la Mairie de Paris, a été titularisé comme agent administratif. Et semble-t-il ça lui convient.

«UNE AMBIANCE CANDIDE »

Farida Sahnoune tranche sur le gris et le noir des autres prévenus. Elle s’avance majestueuse dans une veste imprimée panthère.A la barre, elle déclare d’emblée et à forte voix qu’elle a travaillé depuis l’âge de 17 ans dans la confection. Après 30 ans de bons et loyaux services dans plusieurs entreprises textiles, et avoir élevé trois enfants, elle a été mise au chômage en 2000 ! « C’est dur ! ». Son ex mari connaissait le couple Tibéri, c’est ainsi qu’elle est logée rue Poliveau.
Farida Sahnoune doit beaucoup au couple Tibéri et à madame Affret. Ainsi, alors que militante RPR, elle était bénévole à la permanence de la rue Vésale, madame Tibéri, l’a remarquée et l’a emmenée au commissariat du 5eme. Là, elle a été assermentée par le commissaire. « Cela m’a permis d’être commissaire de police pour les procurations ! Avec Ginette Hardhuin (aujourd’hui décédée), nous allions dans les hôpitaux et les maisons de retraite et nous recueillions les procurations ! Au moins, j’étais employée et payée ! ». La carrière de bénévole –parfois payée- de Farida continue : « Ensuite j’ai été parachutée (sic !) à la mairie du 5eme pour être la petite main de Ginette Hardhuin qui était la secrétaire de madame Affret pour la permanence. Enveloppes, rédaction d’adresses, Farida a le cœur à l’ouvrage, elle le dit : « Je suis une battante, passionnée, le travail ne m’a jamais fait peur. ». Elle fait vite connaissance de toute l’équipe : Patrick Mondain, Madame Mercier la secrétaire personnelle de madame Affret, Monsieur Bertoliatti, huissier qui fait le lien entre la rue Vésale et la Mairie et aussi le Secrétaire Général, Raymond Nantien, et son adjointe Véronique Bourgeix. Bref, madame Sahnoune est heureuse. A ses yeux, madame Affret est « une femme d’action sur laquelle les Tibéri se reposent entièrement. Une personne irremplaçable et sympathique. Avec elle on avait même des fous rires. L’ambiance était candide ! » conclut-elle sans qu’on sache vraiment ce à quoi elle fait référence.
Elle voit régulièrement Madame Tibéri. Son récit s’égare un peu lorsqu’on lui demande s’il est exact que Madame Tibéri et madame Affret se parlaient en corse : elle répond qu’elle connaît bien les Corses et la Corse elle y a été en vacances…Débonnaire, mais futée, Madame Shanoune se limite à dire « ce qu’elle a envie de dire » et ne reconnaît qu’une chose c’est que madame Tibéri donnait ses ordres par l’intermédiaire de madame Affret. Quant à savoir si quelqu’un lui a parlé, lui a demandé comment s’était passé sa garde à vue, elle ne s’en souvient pas du tout !
Là dessus, elle quitte la barre et fait voile sur son fauteuil toujours aussi majestueusement.


DES MENACES VOILEES MAIS PRECISES

Annick Mercier, 53 ans l’ancienne secrétaire de Madame Affret lui succède et l’ambiance change du tout au tout. C’est une femme apeurée qui a du mal à s’exprimer.
-Libérons la parole, l’audience est faite pour cela, madame, dit le Président.
Mais la parole d’Annick Mercier n’est pas libre du tout. Née à Ambroise, elle a travaillé au secrétariat de Michel Debré pendant dix sept ans, et fond en larmes en comparant les conditions de travail à Ambroise et à Paris dans le 5ème. Venue à Paris après un divorce, grâce à l’intervention de son ancien patron, elle a été affectée à la mairie du 5ème au secrétariat de madame Affret « qui a été vraiment humaine avec elle, alors qu’elle traversait une période où elle était complètement perdue sans repère, sans amis. ». Son travail consiste en un secrétariat normal : agenda, rendez-vous, courrier…et les demandes de services dans tous les domaines que reçoit madame Affret. Elle travaille parfois avec Marina Aja, la nièce de madame Affret affectée à sa permanence. Quand elle parle de sa patronne, elle dit, elle aussi, « quand j’étais sous sa coupe ». Et on ne saura jamais si, à la marie du 5ème, être sous les ordres est véritablement « être sous la coupe » de quelqu’un ou si il ne s’agit que d’une erreur de vocabulaire !
Elle précise, tout en assurant qu’elle était contente de travailler avec Madame Affret, que toute l’équipe « était sous une forte contrainte. Elle donnait des ordres oralement mais avec autorité et transmettait ceux de madame Tiberi ».
Au fond, si cette affaire n’avait pas éclaté au grand jour, il eut été possible qu’Annick Mercier fasse toute sa carrière administrative dans le 5 eme. Mais, première surprise, après sa garde à vue, alors qu’elle aimerait parler de l’affaire, « c’est le black-out total ». Seconde surprise, même chose, après la perquisition à la permanence. Toutefois, et apparemment sans que ceci ait un rapport avec cela, Annick Mercier qui cherchait un logement s’en voit attribuer un par monsieur Tibéri, quelques jours avant sa garde à vue. Elle s’y installe. Et dernière surprise, un matin, elle trouve devant sa porte une montagne de plumes. « Haut comme ça » dit elle en tenant sa main à la hauteur de sa taille. Ca lui a fait peur, très peur, cette histoire de plumes. Elle a déposé une main courante au commissariat.
Elle ignore le sens exact de ce geste mais elle a bien deviné qu’il y avait dans ces plumes une volonté de menace et depuis elle a peur. D’autant qu’à la mairie, personne ne lui a expliqué. « Pas un mot, pas un soutien » précise-t-elle en sanglotant. Un long silence passe.
-j’ai l’impression que vous voulez nous dire quelque chose, madame, encourage le président.
Elle soupire puis :
- « J’étais une fonctionnaire honnête pendant dix sept ans avec Monsieur Debré mais là, on m’a rendue malhonnête. J’ai bien conscience que j’ai commis des fautes. Mais j’ai suivi les ordres ! ».
Son avocat intervient pour signaler :
-Puis-je rappeler la réflexion que nous avons entendue : « la présence physique suffit au malaise » !
Et il est vrai que, tandis qu’Annick Mercier regagne sa place, toute la salle ressent le malaise.
Jusqu’ici, nous étions dans une sorte de Clochemerle. Maintenant, les mots « pressions psychologique », « être sous la coupe », « impossible de ne pas obéir », ces expressions prennent tout leur sens.

UNE FEMME DU MONDE EGAREE

Avec Madame Havre, épouse d’un architecte, qui a été lui aussi entendu, le ton change. Elle est « sans profession » mais ardente militante au RPR depuis 1979. Evidemment, elle était à la permanence de la rue Vésale rendant de menus services et a donc bien connu tout ce petit monde, surtout dans des occasions mondaines, « dans les cocktails de la mairie ». « Mon mari, dit-elle, connaissait beaucoup plus de monde, il est très public relation » ajoute-t-elle en accentuant à l’anglaise le dernier mot. Pour l’instant, comme il ne s’agit que de présenter les acteurs et le décor, elle n’a pas grand chose à dire, sinon qu’elle ne fréquentait guère la permanence d’Anne Marie Affret ou celle du maire, place du Panthéon sauf une fois en 1979 où elle a rencontré madame Tibéri pour demander une place en crèche pour sa fille.
On se demande ce qu’elle fait là : elle vit dans le cinquième dans un appartement qui appartient à sa famille depuis deux génération, elle aide son mari et reçoit pour lui : une femme du monde, étourdie que son militantisme a égarée ? C’est du moins l’impression qu’elle donne.

UNE FONCTIONNAIRE PLEINE DE MERITE ET DE PROMOTIONS

La dernière à la barre, c’est Jaqueline Mokricky. Fonctionnaire de catégorie C, quand, elle est affectée en 1990 au secrétariat de Jean Tiberi à la mairie du 5eme. C’est une fonctionnaire exceptionnellement compétente : elle est passée en en huit ans, de la catégorie C à A sans aucun concours mais par une promotion interne à la marie du 5eme, et depuis 1998, elle est chef de cabinet. Fait rarissime dans les annales de la Ville de Paris. Elle n’a rien vu, rien entendu, n’a jamais fréquenté les permanences sauf de temps à autre, celle de madame Affret mais « parce que le magasin des fournitures est juste à côté » ! Elle tenait la permanence de Monsieur Tibéri deux fois par semaine et gérait toutes les demandes qui lui parvenaient dans tous les domaines. Elle n’a aucun souvenir de réunion avec Madame Tibéri et ou madame Affret, aucun souvenir de dysfonctionnement, elle ne s’occupait pas du tout de ce qui concerne le plan politique. Elle ne semble pas avoir conscience que son dernier poste est politique. En fait, elle est frappée d’une discrète forme d’amnésie.
Le président insiste, lui demande si elle était informée de ce qui se passait à la mairie, dans les permanences…Il la tarabuste un peu. On voit Jean Tibéri s’énerver, s’adresser à son avocat. Sa collaboratrice de toutes façons, reste de marbre.
Finalement, lorsque le président lui demande si elle a noté un quelconque changement d’ambiance à la mairie après 1997, elle répond platement :
- Bonne ambiance, nous avons continué à travailler comme avant.
Elle retourne s’asseoir. Pas une mèche de son impeccable brushing n’a bougé.

jeudi 5 février 2009

Peut-on truquer les élections ?

L’émission « C dans l’air » d'Yves Calvi du mercredi 4 février 2009 a traité un sujet qui nous intéresse particulièrement aujourd'hui dans le 5e :

« Peut-on truquer les élections ? »

Sont invités Guy Carcassonne, agrégé de droit public et constitutionnaliste, Jean-Didier Graton, expert-consultant en sécurité des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) et Nathalie Dompnier, professeur de science politique à l’université Lumière Lyon-2.

Retrouvez l'émission sur le site internet de la chaîne :

http://www.france5.fr/c-dans-l-air/

mercredi 4 février 2009

Procès Tiberi 2éme journée : les gendarmes et le bureaucrate

Le président JL Albert est un remarquable magistrat : il maîtrise les vagues successives de robes noires, face à lui, aussi bien que les méandres de ce procès délicat et complexe. Il a le calme et la rouerie d’un vieux routier des prétoires alors qu’il ne doit pas excéder les 45 ans. Ainsi, aujourd’hui, il attaque le dossier lui-même. Il annonce qu’il va nous raconter la chronologie et faire l’analyse.
Le récit en lui-même couvre la moitié de l’après midi- : nous suivons les gendarmes dans une mission qui se révèle de plus en plus compliquée. Or un dicton veut que « les gendarmes sont capables de compter les fourmis si on leur demande ». C’est en tout cas un travail de fourmis auquel ils se livrent puisqu’il s’agit de vérifier dans le cinquième arrondissement, les adresses et les noms correspondants puis les mêmes sur les fichiers de mairie, sur les registres du fisc. Ils vont fouiner dans les comptes des banques, les fonds des sociétés de gestions de la Ville de Paris, cherchent les détails des attributions de logements sociaux, et croisent tous ces renseignements. Comme le dit le président Albert, cet exercice fait penser à « la gare de triage de Saint-Lazare un soir de grève ».
Les gendarmes ne s’arrêtent pas là. Leur travail couvre deux sortes d’investigations : la première intéresse les collèges électoraux, la constitution des listes et les déclarations fiscales. La seconde, la domiciliation des électeurs. Ils découvrent que beaucoup n’ont aucune des qualités requises pour habiter dans les logements qu’ils occupent, d’autres n’y habitent plus depuis des années mais continuent de voter, d’autres n’y ont même jamais résidé. Certains immeubles se révèlent comme de véritables fourmilières où il faut trier le vrai et le faux. Ainsi, 40 rue Poliveau : des radiations massives sont intervenues à cette adresse mais les radiés étaient inconnus des services fiscaux. C’est à dire que ces électeurs fantômes ne payaient pas la taxe d’habitation…
Ainsi 11, rue Claude-Bernard, 25 électeurs y sont répertoriés qui n’y ont pas ou très peu habités.
Ainsi, 157, 159, 218 rue Saint-Jacques, dans des immeubles de l’OPAC, dans une résidence de personnes âgées et au 21 rue gracieuse à la caserne des gardes républicains !
Ainsi 65, rue Galande, plusieurs électeurs sont inscrits au domicile de Olivier Casanova, qui en est le seul locataire et notamment deux électeurs qui ont retiré leur carte d’électeurs en mairie.
Justement, les gendarmes dirigent alors leurs pas vers la place du Panthéon à la mairie. Un registre s’y trouve qui contient les noms des électeurs retirant leur carte à la mairie. Certains y ont encaissé jusqu’à 8 cartes ! Mais pour l’heure, personne n’est capable d’expliquer comment cela s’est fait !

Le président Albert continue son récit minutieux. Chaque épisode consigné dans le dossier répond à une cote qu’il a soin d’énoncer pour que les avocats s’y retrouvent. Dans la salle pas un bruit : de la presse au barreau, du public aux gendarmes, tous sont suspendus à ses lèvres.
Quant aux prévenus, assis en rang d’oignons devant lui, ils ne bronchent pas. Dos à la salle, face à leur juge, ils écoutent eux aussi sagement la saga des gendarmes démontant laborieusement l’organisation de leurs fraudes.

12779 ELECTEURS FICTIFS

Les gendarmes vont donc auditionner soit en garde à vue, soit sur place, les fonctionnaires et les élus : on retrouve les noms connus de l’arrondissement : Bourgeix, Affret, Matthias, Fabre, Bardon, Raymond, Nancien…Certains seront mis en examen d’autres non.
Peu à peu, se mettent à jour de petits systèmes : en 1994, des électeurs ont été frauduleusement inscrits en contrepartie de logement, de places en crèche, avec l’aide de militants RPR qui fournissaient des éléments de dossier. Pour les hébergements, Anne-Marie Affret fournissait les dossiers. D’ailleurs certains hébergeant ignoraient qu’ils abritaient chez eux une douzaine ou moins ou plus d’électeurs fictifs !
Au total, les gendarmes recensent 12 779 électeurs fictifs ! dont 584 totalement inconnus, au nombre desquels figure sans doute le fameux Simon Shakespeare !
La mission des gendarmes s’achève en 2003. Ils produisent alors un énorme tableau mettant en lumière les liens entre l’ensemble des témoins et des mis en examen, les électeurs, les hébergés et les hébergeant…Une sorte de vaste toile d’araignée qui recouvre le 5eme. Ils confient leurs conclusions aux juges d’instruction qui vont interroger les témoins.

Ici, le président Albert, ouvre un autre chapitre de l’histoire : les interrogatoires successifs qui permettent de progresser. Il évoque donc les rendez-vous chez les juges, les aveux ou les contestations, les spécimens d’écriture obtenus même de celles qui refusent de répondre comme Anne-Marie Affret ou Xavière Tiberi, les confrontations entre les différents mis en examen et les rapports d’expertise graphologique démontrant que les formulaires ayant servi à l’obtention de cartes d’électeurs étaient rempli par plusieurs scripteurs différents, les adresses parfois effacées au Tipp-ex et ré-écrites d’une autre main et changée ! Ainsi 49 dossiers ont été falsifiés.
Enfin, le Président arrive à la conclusion, en rappelant le rapport du Conseil Constitutionnel qui admet la fraude.

UN BUREAUCRATE PATHETIQUE

Après une suspension de séance, le Président va commencer à interroger les prévenus. Il les interrogera, prévient-il, essentiellement sur le fonctionnement et les structures de la mairie, se réservant de revenir sur les fraudes elles-mêmes. On s’apercevra vite cependant que tout s’emmêle dès que l’on aborde le fonctionnement de la municipalité du 5ème. Le premier appelé à la barre est Bernard Nancien. Il fut aussi le premier interrogé par les magistrats instructeurs à la suite sans doute d’une lettre qu’il leur avait adressée, après l’article du Canard Enchaîné et le début de l’enquête.
Bernard Nancien est un petit homme gris : cheveux, yeux, costume, allure, tout est gris chez lui. Autant dire presque pathétique. Mais, voici venue son heure, il va enfin pouvoir dire tout ce qu’il a sur le cœur à la face du monde. Il agrippe le micro et se dit prêt à répondre à toutes les questions. Il parle de son cursus : études secondaires, Capacité en droit, et concours de la fonction publique. Et le voici chef de bureau dans le cinquième où il va faire presque toute sa carrière. Tout est dans le presque : en effet, à la fin des années 80, il part pour un an dans le 14e, le Président ne lui demande pas ce qui a motivé ce déplacement.
Mais en 1990, Xavière Tiberi l’appelle pour lui demander de revenir, et même l’invite à déjeuner au Méridien. Bernard Nancien, à la table du Maire en tête avec le couple ! Comment résister à la proposition : il sera secrétaire général de la mairie. Quasiment son bâton de maréchal. Il apprend au cours du déjeuner que son prédécesseur, Madame Tremblay a des problèmes relationnels avec le personnel, en particulier le bureau des élections…Pour l’heure, il n’en sait pas plus.
Ensuite, à la demande du président, il décrit le fonctionnement de l’équipe municipale. Il est simple : 35 personnes aux ordres du maire : « Quand Monsieur Tiberi était maire de Paris, Monsieur Bardon était maire du cinquième mais c’était une potiche !
- J’ai noté des noms dit le président que faisaient les personnes suivantes ?
- Monsieur Baetch ?
- Il faisait les mariages rien de plus.
- Madame Bach ?
- On ne la voyait jamais, elle ne venait qu’au conseil d’arrondissement et au CICA.
- Mais qui avait le pouvoir ?
- Monsieur Tiberi ! avec « deux bras droits, deux : Xavière Tiberi et Anne-Marie Affret ». La vraie cheville ouvrière c’était Xavière Tiberi.
- Que voulez-vous dire ? demande le Président.
- Madame Affret intervenait sur tout. C’est elle qui décidait pour les places en crèches et les logements après accord du maire et de Xavière Tiberi ! Mais rien ne se décidait sans passer par madame Tiberi. En fait, quand on rencontrait Monsieur Tiberi, il était affable, attentif, modeste et gentil. Mais la main de fer c’était Xavière, elle c’était l’ordre et l’obéissance et les sanctions.
Le nouveau secrétaire général l’avoue lui-même : « Je suis gentil, je n’ai pas d’autorité », et comme c’est le maire qui note le fonctionnaire pour son éventuel avancement, tout roule, il file doux. Jusqu’à l’ouverture de l’enquête en 1997. Alors là, Bernard Nancien assure sa prise sur le micro :
-Quand monsieur Tiberi a compris que je n’accepterai jamais de porter le chapeau, j’ai été l’homme à exclure. Il ne me voyait plus ! De retour après ma convocation devant le juge d’instruction, j’ai croisé Anne-Marie Affret, je lui ai dit qu’il fallait dire toute la vérité, elle m’a répondu « je ne peux pas » et c’est la dernière fois que nous nous sommes adressés la parole ! ».
On aborde alors le cœur du sujet : les faux électeurs. En 1994, le prévenu découvre l’ampleur de la fraude. Il va voir le chef de cabinet de Tiberi, sans résultat. Il identifie 3000 faux électeurs dans 74 immeubles dont 900 vont être radiés en 2001. il fait encore une note à Tiberi, croyant que tout le personnel du bureau, son chef Olivier Fabre, madame Bourgeix son adjointe sont solidaires. Mais il ne reçoit aucune réponse.
A vrai dire, Bernard Nancien essaie de passer pour l’employé modèle, le fonctionnaire héroïque puis peu à peu, la fatigue, la longueur de son interrogatoire aidant, il craque doucement : « Dès 1991, Monsieur Comiti alors chef de cabinet du maire m’avait dit qu’il y avait des faux électeurs, au cours d’un déjeuner dans une pizzeria. Il m’a montré un formulaire d’inscription sur les listes, cela donnait les premiers renseignements sur les électeurs et ensuite on pouvait le falsifier. Il n’a rien dit de plus. Oui, j’aurais dû aller plus loin, alerter plus de monde…Oui, on me dira que j’ai été lâche. Mais j’ai fait ce que j’ai pu ! On n’a pas idée de la puissance de Jean Tiberi. Si j’avais été aussi loin qu’il le fallait, si j’avais tout lâché plus tôt, je ne serai pas ici pour vous parler ! ».
Face à cet homme fragile mais qui assène la vérité, la défense tente une attaque d’arrière garde sur son état prétendument dépressif, sur sa carrière qui a tourné court. Il répond avec une grande lucidité : « Oh, je m’attendais à cette question. Oui, je prends des médicaments : pour l’hyper tension, le cholestérol et les calculs rénaux mais pas d’antidépresseurs ! Quant à ma carrière, oui, j’aurais mérité mieux, mais tant pis. Je vais être à la retraite en juin ».
C’est un petit homme brisé, qui à la sortie de l’audience fuit tête baissée, les caméras et les micros. Il n’a ni la force, ni le cynisme de ses complices pour lesquels, il n’existe plus, il ne fait plus partie du clan. On l’ignore.

mardi 3 février 2009

Le Proces Tiberi J1 : Lundi 2 février

Douze ans après les faits, voici enfin le procès des faux électeurs dans le cinquième arrondissement de Paris. Un évènement dans la mesure où les habitants du cinquième avaient fini par penser que, soit l’équipe municipale (toujours aux manettes) était vierge de toute mauvaise action, soit qu’on ne rattraperait jamais les malfaiteurs. Aujourd’hui, on les juge.

Le détail frappe : au-lieu de la 16e chambre correctionnelle, c’est dans la 17e que le procès des faux-électeurs prend place, uniquement d’ailleurs pour des raisons de travaux. Or cette 17e chambre est celle où l’on juge les délits de presse, les diffamations, les journalistes trop audacieux ou ceux dont la plume est allée trop loin… Si on pense que cette affaire a démarré avec un article du Canard Enchainé et que la principale des parties civiles est Lyne Cohen-Solal, journaliste avant d’entrer en politique, tout prend un certain relief. Ajoutons à cela, la presse qui campe devant les portes, et dans les bancs qui lui sont réservés, l’ambiance est aux grands jours !
D’autant que dans la salle, les robes noires sont de qualité et en nombre : entre défense et partie civile, il y a une vingtaine d’avocats dont des ténors comme Thierry Herzog, Jean-Yves Leborgne, Antoine Comte, William Bourdon, Yves Baudelot et d’autres plus subtils mais qui suivent l’affaire depuis le début comme Claude Pollet-Bayeux et Vincent Toledano.
D’entrée, on sent que le Président, Jean-Paul Albert, ne va pas se laisser impressionner par ce déploiement et qu’il va opérer avec doigté et fermeté. Il donne la liste des parties civiles, des témoins puis des prévenus. Et là, première surprise : il impose pour chacune des onze personnes au banc des accusés de lire l’acte d’accusation et la liste des noms des 196 faux-électeurs (parmi eux Simon Shakespeare ! et une véritable tribu de noms corses à croire que le cinquième est la seconde ville corse de France) parmi les milliers qui ont été recensés et pistés. Cela prend du temps, et la défense ronge son frein.
Me Leborgne enchaîne sans attendre pour demander simplement l’annulation du procès ! C’est ainsi que va se jouer ce procès : une guérilla sur la forme et jamais sur le fond puisque les infractions ont été admises par le Conseil Constitutionnel et que les accusés vont avoir du mal à plaider l’innocence. Me Leborgne invoque d’abord le fait qu’ayant envoyé ses conclusions en nullité hier, il a reçu les réponses de la défense voici une heure et qu’il ne peut l’étudier à tête reposée. Il veut le renvoi à demain, une pause, enfin qu’on s’arrête. Le président lui demande d’enchaîner. « Bon » soupire le conseil des accusés qui va offrir une plaidoirie théâtrale comme il y a cinquante ans : « D’abord, suppose-t-il c’est de la vieille histoire, de l’archéologie judiciaire » que l’on ressort fort à propos au moment des élections municipales en février 2008 avec l’ordonnance de renvoi en correctionnel des juges d’instruction. C’est procès politique et rien d’autre. D’autre part, les juges n’ont pas attendu le réquisitoire du procureur pour prendre leur ordonnance de renvoi, en pleine campagne électorale, n’est ce pas suspect cette précipitation ?

Puis Me Leborgne, décidément en pleine forme et décidé à jouer la montre se lance dans une démonstration tendant à prouver que les juges d’instruction ont copié dans leur renvoi, le réquisitoire, la preuve : « page 123, on lit : il sera requis, deux fois !! ». C’est mince, d’autant que de réquisitoire, on n’en voit pas. Il n’a pas été rendu ! N’empêche il demande l’annulation du procès.
Maitre Herzog lui succède pour expliquer que les faits reprochés ne sont pas clairement datés : du 11 au 18 juin 1995, du 25 au 1er juin 1997, ce sont les dates des scrutins mais rien n’est clair sur les faits eux-mêmes.
Jean-Yves Leborgne reprend le micro pour plaider la nullité des parties civiles : « majoritairement d’opposition et qui n’ont véritablement pas subi de préjudice ». Cela paraît logique malgré tout mais pas à lui.
Enfin Me Haïk plaide le fait que le réquisitoire n’ayant pas été versé au dossier il n’y a pas eu débat, la défense n’a pas pu le consulter. Comme le dit Jean-Yves Leborgne : « ce réquisitoire se promène dans ou a côté du dossier comme l’Arlésienne ». Et il revient sur le fait que tous ces noms ne correspondant pas forcément aux adresses trouvées : « Combien d’adresses ? Dix, quatorze cinquante ? Combien de noms ? » Cyniquement, il prétend jouer sur le fait que le nombre joue un rôle plus important que la faute.
La défense a de quoi répondre. Sur la valeur des parties civiles : la Cour de cassation a statué que tout citoyen peut se constituer partie civile dans un tel contexte. Et de renvoyer le procès d’intention sur la politisation du procès aux conseils de la défense !
Finalement le Procureur Général prend la parole. Comme tout est inhabituel dans ce procès, on ne s’étonne pas de voir le Procureur Général, Jean-Claude Marin, c’est à dire la plus haute autorité du Parquet se déplacer devant un tribunal correctionnel. C’est lui qui va, dans une déclaration assez embarrassée expliquer pourquoi le réquisitoire est introuvable !
Il faut savoir que lorsque l’instruction est achevée, les magistrats instructeurs avertissent le Parquet et transmettent les éléments pour que le procurer puisse rédiger son réquisitoire. Pendant trois mois, on peut accepter de nouveaux éléments dans l’enquête. Le délai peut être donc assez long. Or, ce document doit être visé par la hiérarchie. En fait, on comprend entre les lignes que le réquisitoire tel qu’il était rédigé initialement a déplu au Procureur général et a traîné…jusqu’à ce que les juges d’instruction déposent leur ordonnance de renvoi devant le tribunal. On ne peut comprendre le discours assez embarrassé du Procureur Marin si on ignore qu’il est le dernier magistrat nommé par Jacques Chirac et qu’il connaît certainement assez bien Jean Tibéri assis en face de lui au banc des accusés. Il admet volontiers que le retard lui incombe, du au fait qu’il a refusé qu’un réquisitoire soit rendu en février 2008, pour respecter une tradition républicaine qui veut que l’on n’intente pas une action en justice contre un candidat en période électorale. Toutefois entre la fin de l’instruction et l’ordonnance de renvoi 2 ans se sont écoulés : « C’est beaucoup admet-il. C’est un travail collectif, hiérarchisé et indivisible. Ce document a été soumis et amendé plusieurs fois par la hiérarchie, modifié sur la forme et le fond. Le magistrat rédacteur a changé… ». On pourrait comprendre que, par tous les moyens, on a tenté de retarder l’issue…Mais le Procureur précise que l’ordonnance de renvoi peut être rendue avant le réquisitoire, il n’y a rien de surprenant. Lui voulait respecter la tradition républicaine. Il insiste. Pour le reste, il ne voit aucune raison de nullité. Et précise que l’infraction est caractérisée dès lors qu’il y a un faux électeur, ensuite peu importe le nombre.
Malgré tout, le discours du Procureur Marin tout en justifiant le retard, et en donnant raison aux parties civiles laisse une impression de malaise, l’impression d’un homme honnête englué dans une affaire qui ne lui plait qu’à moitié dont il ne sait comment se dépêtrer.
Finalement l’heure tourne, la nuit tombe et il est 19 h. Le Président renvoie l’incident au fond et annonce que mardi on procèdera à l’interrogatoire de Raymond Nancien, ancien secrétaire général de la Mairie du 5e arrondissement, figurant parmi les accusés..
CC

dimanche 1 février 2009

LE PROCES DES FAUX ELECTEURS

Le procès des faux électeurs du Ve arrondissement de Paris se tiendra du 2 février au 4 mars 2009 devant la 16e chambre du tribunal correctionnel de Paris. Il clôture une procédure lancée en 1997, sur une plainte dénonçant des inscriptions irrégulières en vue des municipales de 1995, et des législatives de 1997, en contrepartie d’avantages. 12 ans après le dépôt des plaintes et 4 ans après la fin de l’enquête, ce procès va enfin se dérouler grâce à des juges d’instruction qui se sont lassés d’attendre les réquisitions du parquet et ont décidé du renvoi devant le tribunal correctionnel.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A DEJA CONSTATE LES FRAUDES
L’existence de faux électeurs dans le 5e a déjà été constatée en 1998 par le Conseil Constitutionnel. Alors que l’on parle aujourd’hui de plus de 7.000 électeurs inscrits frauduleusement dont plus de 3.300 auraient voté à l’occasion des élections législatives de 1997, le Conseil constitutionnel déclarait en 1998 « que le nombre des électeurs dont l'inscription peut être suspectée de fraude et qui ont voté au second tour du scrutin est sensiblement inférieur à l'écart des voix entre les candidats à ce tour, qui est de 2.725 voix ».

Décision du Conseil Constitutionnel n° 97-2113 du 20 février 1998
A.N., Paris (2ème circ.)

SUR L'EXISTENCE D'UNE MANOEUVRE DANS L'ELABORATION DES LISTES ELECTORALES
DU CINQUIEME ARRONDISSEMENT :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'enquête diligentée par le Conseil constitutionnel, que, dans le cinquième arrondissement de Paris, un nombre important d'électeurs sont domiciliés dans des logements sociaux de la ville de Paris, alors qu'ils sont inconnus des organismes gestionnaires de ces immeubles ; que, dans certains cas, il s'avère que ces personnes résident en réalité dans des logements de la ville de Paris situés dans d'autres arrondissements ; qu'il résulte également de l'instruction que des électeurs sont domiciliés dans des bâtiments inexistants ou insusceptibles d'accueillir le nombre d'électeurs inscrits et qu'un nombre anormal d'électeurs est domicilié dans les appartements de la mairie du cinquième arrondissement ; que les particularités qui s'attachent aux changements de domicile dans les grandes villes ne suffisent pas à expliquer toutes ces constatations ; qu'au surplus, l'instruction a révélé que des certificats d'hébergement de complaisance avaient été établis par des personnes liées au candidat élu ; que ces constatations ne sont explicables, pour beaucoup d'entre elles, qu'en raison des agissements ou de l'inaction d'organismes liés à la mairie de Paris ou à celle du cinquième arrondissement, ou encore en raison du comportement de personnes liées ou apparentées au candidat élu ;

4. Considérant qu'il résulte en outre de l'instruction que plusieurs centaines de cartes d'électeurs ne sont pas parvenues à leurs destinataires, alors pourtant que ces derniers n'ont pas indiqué de changement de domicile lorsqu'ils les ont retirées ;

5. Considérant que le cumul de ces faits, graves et répétés, au sein du même arrondissement, est de nature à accréditer l'existence d'une manoeuvre dans les conditions d'établissement de la liste électorale ;

6. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que le nombre des électeurs dont l'inscription peut être suspectée de fraude et qui ont voté au second tour du scrutin est sensiblement inférieur à l'écart des voix entre les candidats à ce tour, qui est de 2.725 voix ; que la manoeuvre en cause, aussi condamnable soit-elle, n'a pu dès lors inverser le résultat du scrutin ....

Si les faits de fraude ont été déjà reconnus judiciairement, toute la question sera de savoir si le procès qui va se dérouler permettra de connaître l’étendue de cette fraude, les auteurs et les méthodes utilisées pour la faire prospérer.
Au-delà de ce constat, il convient également de prendre les mesures afin qu’une telle situation ne se puisse se reproduire


LA NECESSITE DE REFAIRE LES LISTES ELECTORALES

L’enjeu sera de trouver les solutions pour qu’il n’y ait plus de suspicion de faux électeurs. En effet, les listes électorales malgré la décision du Conseil Constitutionnel n’ont jamais été refaites comme cela s’est produit ailleurs, notamment pour la ville de Bastia. Cette solution pourtant s’impose.