La pièce que vous
allez certainement appréciée a déjà été jouée plusieurs fois, mais elle reste
un chef d’œuvre de tragicomédie politico judiciaire.
1èr
épisode 1997/2001
Le 23 avril 1997 : un article
du Canard Enchaîné dénonce le système de fraude électorale dans le Vème
arrondissement de Paris, fief du clan Tiberi.
Yves Frémion, candidat écologiste aux législatives et Lyne Cohen Solal , candidate
socialiste porte plainte pour "manoeuvres frauduleuses de nature à altérer
la sincérité du scrutin".
Mais le 1er juin 1997: Jean
Tiberi est réélu député de la deuxième circonscription de Paris avec 2725 voix
d'avance au second tour.
Cela n’empêche pas l’ouverture le 13 et 19
juin 1997 de deux informations judiciaires suite aux deux
plaintes. .
Le 20 février 1998 :
le Conseil constitutionnel valide l'élection de Jean Tiberi arguant du fait que le résultat du scrutin n'aurait pas été
inversé par la fraude électorale, le nombre d'électeurs suspects étant
inférieur à l'écart de voix entre les candidats.
Mais en Juin et juillet 2000 les premières
mises en examens sont prononcées contre
- Raymond
Nentien, secrétaire général de la mairie du Vème.
-Xavière Tiberi et d'Anne-Marie
Affret, adjointe de Jean Tiberi. - Jacqueline Mokrycki, directrice de Cabinet du maire du Vème arrondissement,
- Jean-Charles Bardon ancien maire .
Le 5 juin 2001 : Jean Tiberi est entendu comme
témoin assisté.
2 ème épisode
La
Cour d'Appel de Paris annule les mises en examen de Xavière Tiberi
et d’Anne-Marie Affret.
Réplique de la Cour de Cassation, qui annule la décision de la Cour d'Appel et
rétablit les mises en examen . Et les mises en accusation se poursuivent
en 2003/2005 celle Jean-Charles
Bardon.
Puis c’est Jean Tibéri lui-même qui en mars 2005 est mis en examen
La fin de l'instruction en 2005 permet le renvoi le 12
février 2008 des 11 prévenus devant le tribunal sans
attendre les réquisitions du parquet.
3
ème épisode
Le 2 février 2009 : le procès s’ouvre enfin devant le tribunal
correctionnel de Paris.
Le député-maire du 5e arrondissement de Paris, Jean
Tiberi est condamné le 27 mai 2009 par
le tribunal correctionnel à dix mois de prison avec sursis, 10 000 euros
d'amende et trois ans d'inéligibilité
L'épouse de M. Tiberi, Xavière, décrite à l'audience comme "omniprésente"
à la mairie du 5e, est condamnée, à neuf mois de prison avec sursis
et 5 000 euros d'amende. Une peine de neuf mois de prison avec sursis, 1 500
euros d'amende et deux ans d'inéligibilité a enfin été prononcée à l'encontre
de la première adjointe à la mairie du 5e, Anne-Marie Affret.
Pendant trois ans et les
accusé et leurs conseils utilisent
toutes les possibilités du droit pour échapper à leurs sanctions.
4 ème épisode
La 4ème
épisode se déroule en Cour d’appel en
Novembre 2012, 15 ans après le début de l’affaire des faux électeurs.
Le public a déserté le prétoire. Les 9 avocats conseils sont
presque plus nombreux que les spectateurs
Le décor est nouveau : la
première chambre de la cour d’appel est digne d’une salle de bal
(style Napoléon III) d’une
préfecture de province. Elle date
de l’époque où l’Etat français impérial ou
Républicain dépensait sans compter pour
construire les temps de la justice. Le citoyen perdu dans ces ors peut rêver à
loisir sur ce plafond à caisson
dorés où s’envole dans les airs la justice nue jusqu’à la taille. Les 5 énormes lustres où Tarzan et Chita auraient aimé à se
balancer dispensent une lumière jaunâtre
pour combattre les grisailles du ciel de
Paris en automne.
Jean Tiberi, toujours maire du 5ème arrondissement de
Paris, son épouse, et son ex-première adjointe Anne-Marie Affret vont devoir
répondre de fraude électorale pour les municipales de 1995 et les législatives
de 1997.
Parmi les nouveaux personnages
on remarque : le président Bruno Laroche et les magistrates
s’installés face à la salle sous
une tapisserie des Gobelins aux tons fanés. L’avocat général Bernard de Gouttes
siège à leur gauche .
Le ton de cette tragicomédie a aussi changé du coté de la défense
des accusés. Les seigneurs du barreau
que sont Maitre Herzog, Maitre Haïk et
Maitre Le Borgne avaient rivalisé lors du premier procès d’effet de manches et d’exordes hautes en couleurs .
Aujourd’hui les micro semblent en panne . Même Léon Lef Forster , (avocat de
Pasqua , de Strauss-Kahn ), redoutable
ferrailleur réputé pour être un boute-en-train devant les bancs de la
presse est bien discret aujourd’hui .
La cour d'appel vient d'annoncer qu'elle refuse de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) déposée
lundi . Elle a décidé ce
mardi de ne pas la transmettre à la Cour de cassation. S’en suit alors
une série de nullités de procédure, sur lesquelles les avocats des
accusés ferraillent une grande partie de l'après-midi. Le couple Tiberi, par la
voix de ses conseils Thierry Herzog puis Léon Lef Forster, conteste notamment
la recevabilité des parties civiles, au premier rang desquelles la Mairie de
Paris .
Maitre William Bourdon
avocat des parties civiles s’insurge :
"Les prévenus ont tenté de faire disparaître le procès, et
maintenant les parties civiles", "La
seule chose qu'ils ne peuvent faire disparaître, c'est vous, leurs juges"
En 2011 déjà, le procès avait été repoussé de 14 mois en raison d'une QPC déposée par la défense.
La cour d'appel de Paris a donc vu les choses autrement cette fois-ci. Les
époux et les autres prévenus vont donc être
jugés jusqu'au 21 novembre.
L’avocat général Bernard de Gouttes rappelle que ce foisonnement
de questions préalables conduit à priver de paroles les parties civiles .Il y aurait alors une atteinte à un
procès équitable .Il insiste sur l’argument de la défense invoquant « la partialité des juges » . Ceci ci est irrecevable, car nous ne sommes pas devant le
travail d’un juge, mais devant celui d’un collège de juges . Et puisque nous
sommes devant la Cour d’appel de Paris , en droit il n’y a aucun réquisitoire définitif
Le tribunal de Grande Instance de Paris rejette alors les
conclusions déposées par les avocats des prévenus.
Le président Bruno Laroche procède à la lecture des condamnations des différents jugements et annonce l’audition des témoins pour les jours suivants.